Alfons Petzold & Josef Danilowatz. Le moulin à ossements (1913)



 

Le Moulin à ossements

Le meunier des os, le riche chrétien,
Entremetteur de la Faucheuse, il va bien.

Il broie si fin, il broie si bien
Os d'ouvriers, sang d'ouvriers.

Il tourne si dur, il tourne en silence,
Autour d’un groupe de filles en souffrance. 

Chacune a le teint triste et blême,
Car le soleil, elles le voient à peine.

De six heures du matin à neuf heures et demie le soir,
Courbées, elles restent devant la machine asservies.

La machine parle à chaque fille à voix haute :
"Ma belle, quand seras-tu ma fiancée ?

Quand prendras-tu, pauvre chose pâle,
De moi cet anneau de fiançailles sanglant ?"

"Regarde comme il brille, mon nouveau rouage,
Saisis-le, saisis-le, avant qu’il ne soit trop tard !"

La fille tend la main, hésite un instant...
Un anneau de sang se referme sur sa main.

Un cri, un secours venu trop tard,
Puis, dans la rue, plus tard, un sifflement strident.

Les filles se regardent tristement :
"Demain, ce sera une autre qui y passera."

Texte : Alfons Petzold
Illustration : Josef Danilowatz
Traduction : Robert Niemand-Lavigue 

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