PIE XII prouve l'existence de Dieu à l'aide de la science

En 1951, le pape Pie XII se livre à un exercice de haute voltige devant l'Académie Pontificale des Sciences : Prouver l'existence de Dieu.


 

Thomas d'Aquin avait déjà prouvé l'existence de Dieu à l'aide de la raison (voir les Quinque Viae de la Somme Théologique), PIE XII mit à contribution les modèles en physique des particules et en cosmologie. Le tour de passe-passe pontifical consista à considérer qu'UNE cosmologie (la théorie du Big Bang) et SA cosmogonie (les premiers versets de la Genèse) sont complémentaires.

"Il semble vraiment que la science d’aujourd’hui, remontant d’un coup des millions de siècles, ait réussi à devenir témoin de ce primordial « Fiat lux », lorsque de rien surgit avec la matière un océan de lumière et de radiations (...)." - Pie XII

"La création dans le temps, donc ; et par conséquent, un Créateur ; donc Dieu !". Pie XII avoue qu'il a surtout besoin d'un modèle cosmologique où l'univers n'est pas éternel.

Les théologiens et les scientifiques firent la fine bouche. Les théologiens parce que la démonstration du pape était bien peu théologique, les scientifiques parce que la démonstration du pape était bien peu scientifique. 70 ans après, il manque toujours une Théorie du tout et celle du Big Bang ne fait toujours pas consensus.

Selon Georges Lemaître, à la fois prêtre et physicien, dont l'hypothèse de l'atome primitif constitue le fondement de la théorie du Big Bang, le pape commettait une erreur épistémologique dans ce mélange des genres. Il le fit discrètement savoir au pape et on aurait pu penser que le messe était dite, puisque Pie XII ne s'est plus jamais risqué dans ce terrain miné.

70 ans plus tard, un prêcheur de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier remet une pièce dans le juke-box pour se fracasser dans le mur de Planck. Comme la pensée de Thomas d'Aquin c'est beaucoup trop compliqué pour le temps de cerveau disponible de leur cible et que les théories scientifiques sont en perpétuelle évolution, il faut revenir à la révélation biblique et à une lecture (presque) littérale de la Genèse sous le contrôle du Magistère de l'Eglise Catholique.

 

Albert Einstein et Georges Lemaître

 


LES PREUVES DE L'EXISTENCE DE DIEU À LA LUMIÈRE DE LA SCIENCE NATURELLE MODERNE (PIE XII, 1951)

Un moment de sereine joie, dont nous sommes reconnaissants envers l'Omnipotent, Nous est offert par cette réunion de l'Académie Pontificale des Sciences. Elle Nous donne en même temps l'agréable opportunité de Nous entretenir avec un choix d'éminents Cardinaux, d'illustres Diplomates et de personnalités éminentes, et tout particulièrement avec vous, Académiciens Pontificaux, dignes de la solennité de cette assemblée. En effet, en scrutant et révélant les secrets de la nature, en enseignant aux hommes à diriger ses forces pour leur bien, vous proclamez en même temps, par le langage des chiffres, des formules et des découvertes, les ineffables harmonies du Dieu infiniment sage.

En réalité, la véritable science, contrairement aux affirmations téméraires du passé, plus elle progresse, plus elle découvre Dieu, comme si Celui-ci attendait, en veille, derrière chaque porte que la science ouvre. Nous voulons même dire que cette découverte progressive de Dieu, qui se réalise à travers les avancées du savoir, profite non seulement au scientifique, lorsque — et comment pourrait-il s’en abstenir? — il réfléchit en philosophe, mais aussi à tous ceux qui participent aux nouvelles découvertes ou les prennent comme objet de leurs réflexions.
De manière particulière, les vrais philosophes en tirent profit, car, en s'appuyant sur les conquêtes scientifiques pour leur spéculation rationnelle, ils en retirent une plus grande certitude dans leurs conclusions, une plus grande clarté face aux éventuelles zones d’ombre, et des aides plus convaincantes pour répondre aux difficultés et aux objections avec une satisfaction toujours plus complète.

Ainsi mû et guidé, l'intellect humain se trouve face à la démonstration de l'existence de Dieu, que la sagesse chrétienne reconnaît dans les arguments philosophiques, éprouvés au fil des siècles par des géants du savoir, et qui vous sont bien connus à travers la présentation des « cinq voies » offertes par le Docteur Angélique, saint Thomas d'Aquin, comme un itinéraire rapide et sûr de l'esprit vers Dieu.

Nous parlons d’arguments philosophiques, mais non pas a priori, comme les accuse un positivisme ingrat et incohérent. Ces arguments s’appuient sur des réalités concrètes, vérifiées par les sens et par la science, même si leur force probante provient de la vigueur de la raison naturelle.

Ainsi, philosophie et sciences se développent selon des méthodes analogues et conciliables, utilisant à des degrés divers des éléments empiriques et rationnels, et conspirant en une unité harmonieuse vers la découverte de la vérité.

Mais si l’expérience primitive des anciens a pu offrir à la raison des arguments suffisants pour démontrer l’existence de Dieu, avec l’élargissement et l’approfondissement du champ de cette même expérience, l’empreinte de l’Éternel resplendit désormais plus éclatante et plus nette dans le monde visible.

Il semble donc opportun de réexaminer, à la lumière des nouvelles découvertes scientifiques, les preuves classiques de l’Angélique Docteur, en particulier celles qui sont tirées du mouvement et de l’ordre de l’univers. Il s’agit de rechercher dans quelle mesure une connaissance plus approfondie de la structure du macrocosme et du microcosme contribue à renforcer les arguments philosophiques ; mais aussi d’examiner dans quelle mesure ceux-ci auraient été ébranlés — comme on l’affirme parfois — par le fait que la physique moderne a formulé de nouveaux principes fondamentaux, aboli ou modifié d’anciens concepts dont le sens semblait autrefois fixé et défini, comme par exemple le temps, l’espace, le mouvement, la causalité, la substance, concepts d’une importance capitale pour la question qui nous occupe.

Il ne s’agit donc pas tant d’une révision des preuves philosophiques que d’un examen des bases physiques — et nous devrons nécessairement, ar contrainte de temps, nous limiter à quelques-unes seulement — dont ces arguments tirent leur origine.

Et il n’y a pas lieu de craindre des surprises : la science elle-même ne prétend pas s’écarter de ce monde qui, aujourd’hui comme hier, se présente avec ces cinq « modes d’être » à partir desquels la démonstration philosophique de l’existence de Dieu prend son point de départ et sa force.

Deux caractéristiques essentielles du cosmos

Parmi ces « modes d’être » du monde qui nous entoure, perçus avec une compréhension plus ou moins approfondie mais avec une égale évidence par le philosophe et par l’intelligence commune, deux ont été explorés, vérifiés et approfondis par les sciences modernes bien au-delà de toute attente :

  1. La mutabilité des choses, y compris leur naissance et leur fin.
  2. L’ordre finalisé qui resplendit dans chaque recoin du cosmos.

L’apport des sciences à ces deux démonstrations philosophiques, qui reposent sur ces principes et qui constituent la première et la cinquième voie, est considérable.

À la première, la physique a notamment offert une mine inépuisable d’expériences, révélant la réalité du changement jusque dans les profondeurs les plus secrètes de la nature, où aucune intelligence humaine n’aurait pu autrefois en soupçonner l’existence et l’ampleur. Elle a ainsi fourni une multitude de faits empiriques, qui constituent un puissant soutien au raisonnement philosophique.

Nous parlons de soutien, car la direction même de ces transformations, bien que confirmée par la physique moderne, Nous semble dépasser la simple validation et atteindre presque la structure et le statut d’un argument physique en grande partie nouveau, plus accessible, plus convaincant et plus attrayant pour de nombreux esprits.

Avec une richesse égale, les sciences, en particulier l’astronomie et la biologie, ont récemment apporté à l’argument de l’ordre un ensemble de connaissances si vaste et une vision si enivrante, pour ainsi dire,
de l’unité conceptuelle qui anime le cosmos et de la finalité qui en guide le cours, qu’elles anticipent pour l’homme moderne cette joie que le Poète imaginait dans le ciel empyréen, lorsqu’il vit comment en Dieu « se renferme en un seul volume, lié par l’amour, ce qui dans l’univers se déploie ».

Cependant, la Providence a voulu que la notion de Dieu, si essentielle à la vie de chaque homme, puisse être aisément déduite par un simple regard porté sur le monde, de sorte que ne pas entendre sa voix relève de la folie. Ainsi, chaque approfondissement et progrès des connaissances scientifiques vient en confirmer la vérité.

Souhaitant ici donner un aperçu rapide du précieux service que rendent les sciences modernes à la démonstration de l’existence de Dieu, Nous nous limiterons d’abord au fait des mutations, en mettant principalement en lumière leur ampleur, leur vastité, et, pour ainsi dire, leur caractère total tel que la physique moderne l’observe dans le cosmos inanimé. Nous nous arrêterons ensuite sur la signification de leur direction, telle qu’elle a également été constatée.

Ce sera comme tendre l’oreille à un petit concert de l’immense univers, qui possède pourtant une voix suffisante pour chanter « la gloire de Celui qui meut toute chose ».

A) LA MUTABILITÉ DU COSMOS – LE FAIT DE LA MUTABILITÉ

a) Dans le macrocosme

Il est légitime d’être frappé, à première vue, de constater combien la connaissance du fait de la mutabilité a gagné en terrain, tant dans le macrocosme que dans le microcosme, à mesure que les sciences ont progressé, comme si elles confirmaient par de nouvelles preuves la théorie d’Héraclite : « Tout s’écoule » (panta rhei).

Comme on le sait, l’expérience quotidienne elle-même témoigne d’une immense quantité de transformations dans le monde qui nous entoure, qu’il soit proche ou lointain, notamment les mouvements locaux des corps.

Mais au-delà de ces véritables mouvements locaux, on observe tout aussi aisément de multiples changements physico-chimiques, comme la transformation de l’eau entre ses trois états : vapeur, liquide et glace ; les effets profonds du feu, connus depuis la préhistoire, qui permettent d’opérer des modifications chimiques ; ou encore la désagrégation des pierres et la décomposition des corps végétaux et animaux.

À cette expérience commune est venue s’ajouter la science naturelle, qui a permis de comprendre ces phénomènes et d’autres similaires comme des processus de destruction ou de construction des substances corporelles à l’échelle de leurs éléments chimiques, c’est-à-dire de leurs plus petites parties, les atomes chimiques.

Et plus encore : elle a révélé que cette mutabilité physico-chimique n’est en aucun cas limitée aux corps terrestres, contrairement à ce que croyaient les anciens, mais s’étend à tous les corps de notre système solaire et du vaste univers, que le télescope, et plus encore le spectroscope, ont montré être constitués des mêmes types d’atomes.

 

b) Dans le microcosme

Face à l’indiscutable mutabilité de la nature, y compris inanimée, se dressait cependant encore l’énigme du microcosme inexploré. Il semblait en effet que la matière inorganique, à la différence du monde animé, était en quelque sorte immuable.

Ses plus petites parties, les atomes chimiques, pouvaient certes s’unir entre eux de multiples façons, mais ils paraissaient jouir du privilège d’une stabilité et d’une indestructibilité éternelles, sortant inchangés de toute synthèse ou analyse chimique.

Il y a cent ans, on les croyait encore de simples particules élémentaires, indivisibles et indestructibles. Il en allait de même pour les énergies et les forces matérielles du cosmos, notamment en vertu des lois fondamentales de la conservation de la masse et de l’énergie.

Certains naturalistes se croyaient même autorisés à formuler, au nom de leur science, une fantaisiste philosophie moniste, dont le triste souvenir est notamment lié au nom d’Ernst Haeckel. Mais c’est précisément à son époque, vers la fin du siècle dernier, que cette conception simpliste de l’atome chimique a été balayée par la science moderne.

La connaissance croissante du système périodique des éléments chimiques, la découverte des radiations corpusculaires des éléments radioactifs et bien d’autres faits similaires ont révélé que le microcosme de l’atome chimique, dont les dimensions sont de l’ordre du dix-millionième de millimètre, est le théâtre de mutations incessantes, tout autant que le macrocosme bien connu de tous.

Dans la sphère électronique

C'est d'abord dans la sphère électronique que le caractère de la mutabilité a été établi.

De la structure électronique de l'atome émanent des radiations de lumière et de chaleur, lesquelles sont absorbées par les corps externes, en correspondance avec le niveau d'énergie des orbites électroniques. Dans les parties extérieures de cette sphère se produisent également l'ionisation de l'atome et la transformation de l'énergie lors de la synthèse et de l'analyse des combinaisons chimiques.

On pouvait cependant encore supposer à cette époque que ces transformations chimico-physiques
laissaient subsister un refuge de stabilité, dans la mesure où elles n’atteignaient pas le noyau même de l’atome, siège de la masse et de la charge électrique positive, qui déterminent la place de l’atome chimique dans le système naturel des éléments.

Là, il semblait que l'on trouvait presque l’exemple même de l’absolument stable et immuable.

Et dans le noyau

Mais dès les débuts du nouveau siècle, l'observation des processus radioactifs, attribuables en dernière analyse à un éclatement spontané du noyau, conduisit à exclure un tel modèle de stabilité.

Ainsi, l'instabilité ayant été constatée jusqu'au plus profond de la nature connue, il restait cependant un fait troublant : l’atome semblait du moins inattaquable par les forces humaines, car, au départ, toutes les tentatives visant à accélérer ou à stopper son désintégration radioactive naturelle, ou encore à fragmenter des noyaux non radioactifs, avaient échoué.

Le premier éclatement modeste d’un noyau (celui de l’azote) ne remonte qu’à une trentaine d’années, et ce n’est que depuis quelques années, après d’immenses efforts, qu’il a été possible de réaliser en quantité significative des processus de formation et de décomposition de noyaux.

Bien que ce résultat, qui, dans son application à des fins pacifiques, représente un véritable honneur pour notre siècle, ne constitue encore qu’un premier pas dans le domaine de la physique nucléaire appliquée, il permet néanmoins de tirer une conclusion essentielle :

Les noyaux atomiques sont certes, de par plusieurs ordres de grandeur, bien plus stables et fermes
que les structures chimiques ordinaires, mais ils restent néanmoins soumis aux mêmes lois de transformation, et donc, eux aussi, sont sujets au changement.

En même temps, il a été possible de constater que ces processus jouent un rôle majeur dans l’économie de l’énergie des étoiles fixes.

Au centre de notre Soleil, par exemple, il se produit selon Bethe, à une température avoisinant les vingt millions de degrés, une réaction en chaîne récurrente, dans laquelle quatre noyaux d’hydrogène se lient pour former un noyau d’hélium. L’énergie ainsi libérée compense la perte due à l’irradia­tion du Soleil lui-même.

Même dans les laboratoires physiques modernes, on parvient à réaliser, par bombardement avec des particules dotées d’une énergie extrêmement élevée ou avec des neutrons, des transformations de noyaux, comme cela peut être observé dans l'exemple de l’atome d’uranium.

À cet égard, il convient également de mentionner les effets des radiations cosmiques, qui peuvent fragmenter les atomes les plus lourds, libérant ainsi fréquemment de vastes nuages de particules subatomiques.

Nous avons voulu citer seulement quelques exemples, suffisamment significatifs pour écarter tout doute sur la mutabilité manifeste du monde inorganique, grand et petit : les innombrables transformations des formes d’énergie, en particulier lors des décompositions et combinaisons chimiques dans le macrocosme, et tout autant la mutabilité des atomes chimiques jusqu’à la particule subatomique de leurs noyaux.

L'ÉTERNELLEMENT IMMUTABLE

Le scientifique d’aujourd’hui, en scrutant les profondeurs de la nature plus intensément que ne le faisait son prédécesseur il y a cent ans, sait donc que la matière inorganique, pour ainsi dire dans son noyau le plus intime, porte l’empreinte de la mutabilité, et que par conséquent son être et son existence exigent une réalité entièrement différente et, par nature, immuable.

Comme dans une peinture en clair-obscur, les figures ressortent de l’arrière-plan sombre, n’obtenant ainsi leur effet plein de plasticité et de vie ; ainsi l’image de l’éternellement immuable émerge clairement et brillamment du torrent qui emporte et engloutit toutes les choses matérielles, dans le macrocosme et le microcosme, dans une intrinseque mutabilité qui ne se pose jamais. Le scientifique, qui s’arrête sur le bord de ce vaste torrent, trouve le repos dans ce cri de vérité avec lequel Dieu se révèle : « Je suis celui qui suis », et que l'Apôtre loue comme « Pater luminum, apud quem non est transmutatio neque vicissitudinis obumbratio ».

B) LA DIRECTION DES TRANSFORMATIONS

a) dans le macrocosme : la loi de l'entropie

Mais la science moderne n’a pas seulement élargi et approfondi nos connaissances sur la réalité et l’étendue de la mutabilité du cosmos ; elle nous offre également des indications précieuses sur la direction selon laquelle les processus dans la nature se déroulent. Alors qu’il y a encore cent ans, surtout après la découverte de la loi de la constance, on pensait que les processus naturels étaient réversibles et que, selon les principes de la causalité stricte – ou mieux, de la détermination – de la nature, il était possible de renouveler et rajeunir sans cesse le cosmos, avec la loi de l’entropie, découverte par Rudolf Clausius, on a appris que les processus naturels spontanés sont toujours accompagnés d’une diminution de l’énergie libre et utilisable. Cela signifie que, dans un système matériel clos, cela doit finalement conduire à l’arrêt des processus à une échelle macroscopique. Ce destin fatal, que seules des hypothèses parfois trop gratuites, comme celle de la création continue supplétive, s’efforcent de soustraire à l’univers, mais qui au contraire ressort clairement de l’expérience scientifique positive, postule de manière éloquente l’existence d’un Être nécessaire.

b) dans le microcosme :

Dans le microcosme, cette loi, fondamentalement statistique, n’a pas d’application, et de plus, au moment de sa formulation, on ne connaissait presque rien de la structure et du comportement de l’atome. Cependant, les recherches les plus récentes sur l’atome ainsi que le développement inattendu de l'astrophysique ont permis d’accomplir des découvertes surprenantes dans ce domaine. Le résultat ne peut ici être que brièvement évoqué, et il est que même dans le développement atomique et intraatomique, un sens de direction est clairement attribué.

Pour illustrer ce fait, il suffira de revenir à l'exemple déjà mentionné du comportement des énergies solaires. La structure électronique des atomes chimiques dans la photosphère du soleil libère chaque seconde une quantité gigantesque d’énergie rayonnante dans l’espace environnant, sans retour. La perte est compensée par l'intérieur du soleil grâce à la formation d'hélium à partir d’hydrogène. L'énergie ainsi libérée provient de la masse des noyaux d'hydrogène, qui, dans ce processus, se convertit en énergie équivalente pour une petite partie (7%). Le processus de compensation se déroule donc aux dépens de l'énergie qui, à l’origine, dans les noyaux d’hydrogène, existe sous forme de masse. Ainsi, cette énergie, au cours de milliards d'années, se transforme lentement mais irréversiblement en radiations. Une chose similaire se produit dans tous les processus radioactifs, qu’ils soient naturels ou artificiels. Ici aussi, donc, dans le microcosme strict et proprement dit, nous retrouvons une loi qui indique la direction de l’évolution, et qui est analogue à la loi de l’entropie dans le macrocosme. La direction de l’évolution spontanée est déterminée par la diminution de l’énergie utilisable dans la structure et dans le noyau de l’atome, et jusqu’à présent, il n’existe pas de processus qui pourraient compenser ou annuler cette transformation par la formation spontanée de noyaux de haute valeur énergétique.

C) L'UNIVERS ET SON DÉVELOPPEMENT

•Dans le futur

Ainsi, lorsque le scientifique porte son regard de l’état présent de l’univers vers l’avenir, aussi lointain soit-il, il se voit contraint de constater, tant dans le macrocosme que dans le microcosme, le vieillissement du monde. Au fil de milliards d’années, même les quantités de noyaux atomiques apparemment inépuisables perdent de l’énergie utilisable, et la matière s’approche, pour ainsi dire, d’un volcan éteint et déformé. Et il est naturel de penser que, si le cosmos actuel, aujourd’hui si vibrant de rythmes et de vie, n’est pas suffisant pour rendre raison de lui-même, comme on l’a vu, encore moins le pourra ce cosmos sur lequel passera, à sa manière, l’aile de la mort.

• Et dans le passé

Portons maintenant notre regard vers le passé. À mesure que l’on remonte dans le temps, la matière se présente toujours plus riche en énergie libre et devient le théâtre de grands bouleversements cosmiques. Ainsi, tout semble indiquer que l’univers matériel a eu un puissant commencement à une époque finie, étant doté d’une abondance inimaginablement grande de réserves énergétiques, grâce auxquelles il s’est d'abord rapidement développé, puis, avec une lenteur croissante, est arrivé à son état actuel.

Deux questions se posent alors spontanément à l’esprit :
La science est-elle capable de dire quand ce puissant principe de l'univers est survenu ? Et quel était l'état initial, primitif de l'univers ?
Les meilleurs experts en physique atomique, en collaboration avec les astronomes et les astrophysiciens, ont tenté d’éclairer ces deux problèmes difficiles, mais ô combien intéressants.

 

D) Le principe dans le temps
Tout d'abord, pour citer quelques chiffres, qui ne prétendent rien d'autre que d'exprimer un ordre de grandeur en désignant l'aube de notre univers, c'est-à-dire son principe dans le temps, la science dispose de plusieurs voies, chacune relativement indépendante mais convergentes, que nous indiquerons brièvement :

L'éloignement des nébuleuses spirales ou galaxies. - L'examen de nombreuses nébuleuses spirales, réalisé en particulier par Edwin E. Hubble au Mount Wilson Observatory, a conduit au résultat significatif - bien que tempéré par des réserves - que ces systèmes lointains de galaxies ont tendance à s'éloigner les uns des autres à une telle vitesse que l'intervalle entre deux nébuleuses spirales se double en environ 1300 millions d'années. Si l'on regarde en arrière dans le temps de ce processus de "l'univers en expansion", il apparaît que, entre un et dix milliards d'années, la matière de toutes les nébuleuses spirales était compressée dans un espace relativement restreint, au moment où les processus cosmiques ont commencé.

 L'âge de la croûte solide de la Terre. - Pour calculer l'âge des substances originaires radioactives, on tire des données très approximatives de la transmutation de l'isotope de l'uranium 238 en un isotope de plomb (RaG), de l'uranium 235 en actinium D (AcD) et de l'isotope de thorium 232 en thorium D (ThD). La masse d'hélium qui se forme ainsi peut servir de contrôle. Par cette méthode, il semblerait que l'âge moyen des minéraux les plus anciens soit d'au maximum 5 milliards d'années.

 L'âge des météorites. — La méthode précédente, appliquée aux météorites pour calculer leur âge, a donné à peu près la même estimation de 5 milliards d'années. Ce résultat prend une importance particulière car les météorites proviennent de l'extérieur de notre Terre et, à l'exception des minéraux terrestres, elles sont les seuls exemples de corps célestes que l'on peut étudier dans les laboratoires scientifiques.

 La stabilité des systèmes d'étoiles doubles et des amas d'étoiles. — Les oscillations gravitationnelles à l'intérieur de ces systèmes, comme l'attraction des marées, réduisent de nouveau leur stabilité à une durée de 5 à 10 milliards d'années.

 Si ces chiffres peuvent étonner, ils ne présentent cependant rien de nouveau ou de différent pour le croyant le plus simple, car ils n'apportent qu'une compréhension plus concrète et presque mathématique des premières paroles de la Genèse : "Au commencement", c'est-à-dire le commencement des choses dans le temps. Ces paroles donnent une expression concrète à ce concept, et un réconfort supplémentaire en découle pour ceux qui, avec l'Apôtre, partagent l'estime envers cette Écriture, divinement inspirée, qui est toujours utile "pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire". 

E) L'ÉTAT ET LA QUALITÉ DE LA MATIÈRE PRIMITIVE

 Avec le même engagement et la liberté d'enquête et de vérification, les savants ont appliqué leur esprit audacieux non seulement à la question de l'âge du cosmos, mais également à l'autre question déjà mentionnée, et certainement plus ardue, concernant l'état et la qualité de la matière primitive.

Selon les théories qui servent de base, les calculs relatifs varient considérablement les uns des autres. Toutefois, les scientifiques s'accordent à penser qu'à côté de la masse, la densité, la pression et la température doivent avoir atteint des niveaux absolument énormes, comme on peut le voir dans le récent travail d'A. Unsöld, directeur de l'Observatoire de Kiel.

Ce n'est qu'avec de telles conditions que l'on peut comprendre la formation des noyaux lourds et leur fréquence relative dans le système périodique des éléments.

D'autre part, la pensée, avide de vérité, insiste légitimement pour se demander pourquoi la matière est arrivée à un tel état, si improbable selon notre expérience quotidienne, et ce qui l'a précédée. En vain on attendrait une réponse de la science naturelle, qui, au contraire, déclare honnêtement se trouver face à une énigme insoluble. Il est vrai qu'on demanderait trop à la science naturelle de répondre à une telle question ; mais il est aussi certain que l'esprit humain, lorsqu'il s'approfondit dans la méditation philosophique, pénètre plus profondément le problème.

Il est indéniable qu’un esprit éclairé et enrichi par les connaissances scientifiques modernes, qui évalue sereinement ce problème, est amené à briser le cercle d’une matière totalement indépendante et autochtone, soit parce qu’elle est incréée, soit parce qu’elle s’est créée elle-même, et à remonter vers un Esprit créateur. Avec le même regard clair et critique, avec lequel il examine et juge les faits, il entrevoit et reconnaît l’œuvre de l’omnipotence créatrice, dont la vertu, agitée par le puissant « fiat » prononcé il y a des milliards d’années par l’Esprit créateur, s’est déployée dans l’univers, appelant à l’existence, d’un geste d’amour généreux, la matière débordante d’énergie. Il semble vraiment que la science d’aujourd’hui, remontant d’un coup de millions de siècles, ait réussi à devenir témoin de ce primordial « Fiat lux », lorsque de rien surgit avec la matière un océan de lumière et de radiations, tandis que les particules des éléments chimiques se scindaient et se réunissaient en millions de galaxies.

Il est vrai que les faits jusqu'ici établis concernant la création dans le temps ne constituent pas une preuve absolue, comme ceux qui proviennent de la métaphysique et de la révélation, en ce qui concerne la simple création, et de la révélation, s'il s'agit de création dans le temps. Les faits liés aux sciences naturelles auxquels nous avons fait référence nécessitent encore de plus amples investigations et confirmations, et les théories fondées sur ceux-ci ont besoin de nouveaux développements et de preuves, pour offrir une base sûre à un raisonnement qui, en soi, est hors du domaine des sciences naturelles.

Néanmoins, il est digne d'attention que les modernes pratiquants de ces sciences considèrent l'idée de la création de l'univers tout à fait conciliable avec leur conception scientifique, et qu'ils y sont même spontanément conduits par leurs investigations ; alors qu’il y a encore quelques décennies, une telle « hypothèse » était rejetée comme absolument inconciliable avec l’état actuel de la science. Encore en 1911, le célèbre physicien Svante Arrhenius déclarait que « l’opinion selon laquelle quelque chose pourrait naître de rien est en contradiction avec l’état actuel de la science, selon lequel la matière est immuable ». De même, l’affirmation de Platon : « La matière existe. De rien, rien ne naît : par conséquent, la matière est éternelle. Nous ne pouvons pas admettre la création de la matière. »

Combien différent et plus fidèle reflet des immenses visions est en revanche le langage d’un scientifique moderne de premier ordre, Sir Edmund Whittalcer, académicien pontifical, lorsqu’il parle des recherches mentionnées sur l’âge du monde : « Ces différents calculs convergent vers la conclusion qu’il y eut une époque, il y a environ 10^9 ou 10^10 ans, avant laquelle le cosmos, s’il existait, existait sous une forme totalement différente de tout ce qui nous est connu : de sorte qu’elle représente la limite ultime de la science. Nous pouvons peut-être sans impropriété nous y référer comme à la création. Elle fournit un cadre concordant à la vision du monde, qui est suggérée par les évidences géologiques, selon lesquelles chaque organisme existant sur la terre a eu un commencement dans le temps. Si ce résultat devait être confirmé par des recherches futures, il pourrait bien devenir considéré comme la découverte la plus importante de notre époque ; car il représente un changement fondamental dans la conception scientifique de l’univers, semblable à celui réalisé, il y a quatre siècles, par l’œuvre de Copernic. »

Conclusion
Quelle est donc l'importance de la science moderne concernant l'argument en faveur de l'existence de Dieu déduit de la mutabilité du cosmos ? Par des investigations exactes et détaillées dans le macrocosme et le microcosme, elle a considérablement élargi et approfondi la base empirique sur laquelle repose cet argument, et à partir de laquelle on conclut à l'existence d'un Être à part, par sa nature immuable.

De plus, elle a suivi le cours et la direction des développements cosmiques, et, tout comme elle a entrevu leur terme fatal, elle a désigné leur commencement dans un temps d'environ 5 milliards d'années, confirmant avec la concrétude propre aux preuves physiques la contingence de l'univers et la déduction fondée selon laquelle, vers cette époque, le cosmos est sorti de la main du Créateur.

La création dans le temps, donc ; et par conséquent, un Créateur ; donc Dieu !
C'est cette voix, bien qu'implicite et incomplète, que nous demandions à la science, et que la présente génération humaine attend d'elle. Cette voix émergeant de la considération mûrie et sereine d'un seul aspect de l'univers, à savoir de sa mutabilité ; mais elle est déjà suffisante pour que l'humanité entière, sommet et expression rationnelle du macrocosme et du microcosme, prenne conscience de son grand facteur, se sente sienne, dans l'espace et dans le temps, et, tombant à genoux devant sa souveraine Majesté, commence à invoquer son nom :
« Rerum, Deus, tenax vigor, immotus in te permanens, lucis diurnae tempora successibus determinans. »

La connaissance de Dieu, en tant qu'unique créateur, commune à de nombreux scientifiques modernes, est bien la limite extrême que peut atteindre la raison naturelle ; mais elle ne constitue pas — comme vous le savez bien — la dernière frontière de la vérité.

De ce même Créateur, rencontré par la science sur son chemin, la philosophie, et bien plus encore la révélation, dans une collaboration harmonieuse, car toutes trois sont des instruments de la vérité, presque comme les rayons du même soleil, contemplent la substance, dévoilent les contours, dessinent les formes. Surtout, la révélation rend sa présence presque immédiate, vivifiante, aimante, telle qu'elle est perçue par le simple croyant ou le scientifique dans l'intimité de leur esprit, lorsqu'ils répètent sans hésitation les mots concis du Vieux Symbole des Apôtres : « Credo in Deum, Patrem omnipotentem. Creatorem caeli et terrae. »

Aujourd'hui, après tant de siècles de civilisation, parce que des siècles de religion, il ne s'agit pas déjà de découvrir Dieu pour la première fois, mais plutôt d'urgemment Le sentir comme Père, Le respecter comme Législateur, Le craindre comme Juge ; il est essentiel, pour le salut des peuples, qu'ils adorent Son Fils, le Rédempteur bien-aimé des hommes, et se soumettent aux doux impulsions de l'Esprit, fécondant et sanctifiant les âmes.

Cette persuasion, qui prend ses lointaines racines dans la science, est couronnée par la foi, qui, enracinée de plus en plus dans la conscience des peuples, pourra vraiment apporter un progrès fondamental à l'évolution de la civilisation.

C’est une vision complète, du présent comme de l'avenir, de la matière comme de l'esprit, du temps comme de l'éternité, qui, en éclairant les esprits, épargnera aux hommes d'aujourd'hui une longue nuit de tempête. C’est cette foi qui nous fait, en ce moment même, élever vers Celui que nous venons d'invoquer : Vigor, Immotus et Pater, la fervente supplication pour tous Ses enfants, qui nous sont confiés : « Largire lumen vespere, - quo vita nusquam decidat » : lumière pour la vie du temps, lumière pour la vie de l’éternité.

PIE XII - Discours devant l'Académie Pontificale des Science

Le 22 novembre 1951.

(Cette traduction n' a pas d'ambition académique et encore moins théologique.)

 Pie XII - "Le prove dell'esistenza di Dio alla luce della scienza naturale moderna" (pp. 31 à 43)

 Théories physiques : Méthodes, Modèles et Applications (Document du CNRS au format PDF)

 


 

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